PhiloEcole – B. Bobée, C. Renard

Date/heure
Date(s) - 19/11/2021
9h00 - 10h30

Emplacement
ULiège, XX août

Catégories


Au Théâtre Universitaire Royal de l’Université de Liège (Turlg).

9h-9h45

Barbarie et Philosophie

Quel sens a la transmission culturelle et en particulier tout savoir scolaire, s’il ne s’accompagne pas d’une mise en valeur de notre capacité à être critique vis-à-vis de ces contenus culturels et de leurs modes de transmission ? De façon générale, que vaut une culture qui ne s’interroge pas sur ses propres valeurs, sur les comportements sociaux et sur les enjeux de société qu’elle véhicule ? Si nous voulons construire une société ouverte, une véritable culture de l’esprit critique doit être à l’œuvre à tous les niveaux de l’enseignement scolaire. Certes, cela accorde avec les exigences de l’Institution scolaire française mais l’exhortation à être critique et même la lecture de textes critiques tels que nous les étudions en cours de philosophie au lycée, suffisent-ils à développer l’esprit critique des élèves ?

L’école participe d’une mise en valeur de l’esprit critique du point de vue théorique : elle donne des connaissances disciplinaires, elle éveille aux dangers de la désinformation, elle permet même une certaine prise de conscience de biais cognitifs, etc. En un mot, elle aide les élèves à déterminer ce qu’il convient de penser. Mais met-elle suffisamment en valeur la capacité à discerner ce qu’il convient de faire face à telle ou telle situation (dois-je obéir inconditionnellement à cette autorité ? Dois-je suivre le groupe ?). Car être critique ce n’est pas seulement savoir trier le vrai du faux, ce n’est pas seulement pouvoir déterminer ce qu’il convient de penser eu égard à la science et à ses démarches ; c’est aussi savoir déterminer ce qu’il convient de faire, conformément à ce que l’on juge légitime. Or l’histoire aussi bien que la psychologie sociale ont montré que nous pouvons nous soumettre à des ordres ou à adopter des comportements que pourtant nous jugeons illégitimes. Nous agissons alors paradoxalement à l’encontre de ce que notre conscience et notre volonté nous dictent. Aussi, considérons-nous que cet aspect pratique de l’esprit critique doive être entraîné au sein même du système éducatif, à travers une réflexion et des mises à l’épreuve encadrées qui permettent aux élèves de dépasser cet autre paradoxe d’un système scolaire qui les enjoint à être critique et à s’émanciper, dans un cadre qui est plus souvent le lieu de l’obéissance.

Nous abordons cet aspect de l’esprit critique avec nos élèves de terminale en cours de philosophie, depuis plus de 5 ans, à travers une réflexion sur la liberté et la responsabilité. Notre séquence démarre par une mise en situation où leur capacité à résister à des demandes qu’ils jugent pourtant illégitimes et à résister à la pression du groupe sont mises à l’épreuve.

Notre atelier sera alors l’occasion de présenter et de questionner cet aspect de notre pratique de classe au lycée et à réfléchir à ses fondements et enjeux philosophiques (voir Adorno, Sartre, Nussbaum, Milgram, Kant, La Boétie). Notre animation à Liège fera alors le lien entre la pratique scolaire de la philosophie, la culture de l’esprit critique et la place des élèves et des futurs citoyens dans la cité.

Benjamin Bobée – Professeur de philosophie au lycée. France.

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9h45-10h30

Dystopie et Philosophie

La culture philosophique (histoire de la pensée, auteurs, textes classiques) tient une place considérable, voire essentielle dans l’enseignement de la philosophie au lycée et à l’Université. Le Bulletin officiel à destination des professeurs de terminale la considère d’ailleurs comme “la matière même” de celui-ci. La philosophie comme discipline scolaire se définit donc par un champ d’œuvres spécifiques et exclusifs.

Si pour philosopher, il faut apprendre à se mettre à distance de soi, de sa pensée, et qu’à cette fin des médiations culturelles sont nécessaires, les œuvres philosophiques seraient-elles les seuls textes qui permettent d’apprendre à philosopher ? D’ailleurs qu’est-ce qu’un texte philosophique ? Est-ce son auteur ou la lecture qu’on peut en faire qui le définit comme philosophique ? Pour reprendre la célèbre distinction de Kant, s’agit-il d’apprendre la philosophie (son histoire, ses auteurs) ou à philosopher (une démarche rationnelle particulière, des habiletés de pensée…) ?

Notre présentation porte sur la portée philosophique des dystopies de jeunesse et young adult et s’interroge sur la manière dont elles permettent de penser le monde et en particulier leur pertinence dans un cours de philosophie dans le secondaire. Il s’agira d’examiner s’il est possible d’apprendre à philosopher grâce aux romans dystopiques de jeunesse et dans quelles mesures cette démarche est en rupture ou en continuité avec l’enseignement traditionnel de la philosophie. Comment la dystopie peut-elle aider les adolescents à philosopher, à penser le réel ? La dystopie étant une fiction, est-elle efficace pour faire réfléchir sur l’organisation sociale et politique de la société réelle ? La fiction dystopique permet-elle de rêver, de se divertir, de s’échapper de la réalité ou au contraire de mieux s’y plonger, d’y voir plus clair ? La dystopie de jeunesse développe-t-elle l’esprit critique ou bien peut-elle amener le lecteur à accepter plus facilement les privations ou coercitions de la vraie vie, qu’il perçoit comme infime en comparaison ?

En questionnant les frontières entre deux disciplines distinctes en éducation : la littérature et la philosophie, nous verrons s’il est possible de penser une “littératie philosophique”, c’est-à-dire une capacité transmédiatique à lire le monde philosophiquement.

Charlie Renard – Professeur de philosophie au lycée. France.

Réservations

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